Touché !

Le groupe majoritaire de la municipalité a jugé bon de prendre comme sujet de tribune dans le numéro d’avril de Clichy Actu la question de la fermeture de l’hôpital Beaujon. Il faut croire que les actions citoyennes sur ce sujet ont fini par pousser le maire dans ses retranchements.

Une tribune pour mieux esquiver le débat

Après des mois de refus d’un débat public, M. Muzeau utilise une tribune dans le magazine de la Mairie pour aborder une question qui concerne la santé publique sur la ville. Peut-être que, quand il sera maire, il prendra la peine d’agir.

Et non, ce n’est pas un sujet où la municipalité « n’a pas la pleine maîtrise ». Certes, la décision finale appartient au gouvernement. Celui-ci mène une politique de fermeture des hôpitaux publics pour soi-disant réduire les coûts et de fait favoriser l’hospitalisation privée comme le montre l’exemple voisin de Neuilly où, dans le même temps, s’est développé le plus grand groupe hospitalier d’Ile-de-France.

Prétendre ne pas avoir la pleine maîtrise c’est une manière hypocrite de se laver les mains du problème. Si la santé publique n’est pas du ressort des collectivités territoriales, pourquoi y a-t-il un maire-adjoint à la santé ? Pourquoi les collectivités sont-elles représentées au Conseil de surveillance de l’APHP ?

Jusqu’à preuve du contraire ce sont nos impôts et nos cotisations sociales qui financent les hôpitaux publics et privés. Ce qui justifie que nos représentants, à tous les niveaux, soient responsables des politiques menées en notre nom. Monsieur le Maire n’est pas dans cette logique démocratique puisqu’il a refusé d’agir pour que l’enquête publique sur le projet de Campus hospitalo-universitaire à Saint-Ouen soit ouverte sur le territoire de Clichy et du nord Hauts-de-Seine. Sur ce sujet il avait une totale liberté – et même un devoir – d’agir.

Cet argument « nous n’avons pas la pleine maîtrise » est foutraque. Quels sont en définitive les sujets sur lesquels la municipalité a « pleine maîtrise » ?
Les finances communales ? Le gouvernement baisse la dotation globale de fonctionnement (DGF). Que fait la Mairie?
L’école ? L’école publique est asphyxiée par la politique du gouvernement. Que fait la municipalité ?
Les transports ? L’État et la Région sont à la source des problèmes quotidiens que rencontrent les Franciliens et les habitants.es de Clichy. Que fait le Maire ?
L’urbanisme ? La plupart des règles d’urbanisme sont édictées en dehors de la Mairie, au fil d’enquêtes publiques bidonnées et des décisions des différents échelons territoriaux : département, Métropole du Grand Paris, Région et bien sûr l’État en Ile-de-France. Que fait le Maire ? Il se tord les bras en se lamentant sur « l’absence de maîtrise » de la municipalité sur ces sujets ?

En définitive, la position du Maire sur toutes ces questions équivaut à une démission devant la difficulté. M. Muzeau refuse d’admettre que dans ces domaines l’enjeu est politique. Sa volonté de gérer la ville comme une entreprise par un Conseil d’administration aboutit à dessaisir les citoyens et citoyennes de leur droit à prendre part aux décisions sur tout ce qui les concerne. Il ne veut surtout pas dire que sur ses questions la municipalité soutient la politique du gouvernement de Macron et que les choix faits ont des retombées négatives sur la vie quotidienne des Clichoises et Clichois.

Pour mémoire, M. Muzeau a refusé aux opposants clichois au projet de fermeture de Beaujon une salle municipale pour l’organisation d’un débat public. Cette décision lui incombait pleinement. Saisi par lettre par Léa Druet et moi-même pour intervenir auprès du Préfet pour inclure Clichy et le nord Hauts-de-Seine dans le périmètre de l’enquête publique, il a fait le mort. Interpellé à ce sujet par les membres de Clichy en commun au Conseil municipal, il a botté en touche, refusant tout débat.

Et maintenant il vient pleurnicher sur l’absence de « pleine maîtrise » de sa municipalité. De qui se moque-t-on ? Par sa tribune de Clichy Actus il confirme qu’il esquive pour ne pas aborder les sujets de fond.

Puisqu’il a de si bons arguments, pourquoi ne pas les confronter plutôt que les exposer en vingt cinq lignes alors qu’il dispose de tous les moyens d’une municipalité ? Réponse : parce qu’il sait que la question de la fermeture de Beaujon est impopulaire et que cela va a l’encontre des besoins et des aspirations de la population clichoise. Parce qu’il veut éviter de trop rendre public son soutien politique à Macron.

Pour lui, la question de « maintenir cet équipement sur notre territoire pour garantir une offre de santé de proximité » ne serait pas un argument ? La fermeture d’une maternité et d’un service des urgences ce n’est pas un problème ? Sachant que ces deux services doivent pour fonctionner avoir la disponibilité d’autres services hospitaliers – blocs opératoires, analyses, etc. – ce n’est pas un problème ?

M. le Maire a un argument magique : la « vétusté » de l’hôpital Beaujon. Débattons-en plutôt que décréter ou reprendre sans examen la thèse de l’APHP qui pour noyer son chien l’accuse de la rage. D’autres aussi compétents que les technocrates au service des politiques macronistes de réduction de l’offre hospitalière publique disent le contraire. La majorité des syndicats hospitaliers ne valident pas.
Seuls des bâtiments annexes au bâtiment principal sont en piteux état en raison de leur abandon dans la perspective de fermeture. C’est facile à comprendre. Et tous les projets sont envisageables pour le rénovation du site puisque le bâtiment principal est sain et n’occupe que 30 % des terrains publics disponibles de l’APHP. Pourquoi ne pas dire maintenant quels sont les projets pour ces terrains publics avant la fermeture ? Parce que mettre des projets immobiliers en face d’un hôpital existant ne serait pas bien vu par la population ?

« Enfin, le nouvel hôpital tient compte des impacts liés au climat » veut croire la majorité municipale. Y a-t-il un conseiller municipal de la majorité pour avoir examiné les arguments des opposants de Saint-Ouen au projet de Campus ? Car la population de Saint-Ouen n’est pas enthousiaste. L’examen du projet élaboré en 2013 ne tient pas compte des objections écologistes et urbanistiques pour ce type d’équipement en centre ville. Pas plus que le projet ne tient compte des objections des personnels soignants qui plaident contre un hôpital usine, symptôme d’un autre temps où les enjeux économiques primaient sur les enjeux climatiques.

Un peu de sérieux sur un sujet qui mérite mieux que vint-cinq lignes dans une tribune du journal municipal. En comparaison, l’enquête publique du mois de mars a recueilli plus de six cents contributions, un résultat rarement vu dans ce type d’enquête. Au point que le Préfet de Seine-Saint-Denis s’est vu contraint de demander au tribunal administratif qui a ordonné la nouvelle enquête un délai d’un mois supplémentaire pour que l’État puisse mettre de l’ordre dans ses idées un peu bousculées.

Soyons sérieux. La mobilisation sur le sujet ne va pas s’arrêter parce qu’une tribune prétend balayer l’opinion des citoyennes et des citoyens. Ce ne sera pas la première fois que M. Muzeau, désavoué, est contraint de renoncer à un projet qui heurte la population. Pour notre part, nous maintenons nos demandes d’un débat public sur l’avenir de l’hôpital public de Beaujon. Depuis dix ans, le projet de campus à Saint-Ouen n’a pas avancé. Il attendra encore.

Robert Crémieux

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