Dans un post publié sur le network Linkedin, Emmanuelle Cosse, présidente de l’Union sociale pour l’Habitat (USH) a lancé un appel inédit aux parlementaires et au gouvernement sur les enjeux du projet de loi de finances pour 2026.
Partant d’un constat largement partagé sur l’asphyxie budgétaire des HLM, elle détaille les prélèvements passés et futurs réalisés par l’État sur les bailleurs sociaux. « Depuis 2018 à travers cette RLS, à travers la hausse des taux de TVA, à travers un financement erratique des aides à la rénovation, le secteur du logement social, ce sont plus de 16 milliards qui auront été pris aux organismes de logement social. »
Et le pire reste à venir : « Si rien n’est changé au PLF 2026, cette prochaine année, sera même une année « record » avec un montant supérieur à 2 milliards. »

Logiquement, elle conclut qu’il est nécessaire « de redonner aux organismes de logement social qui sont un des moteurs essentiels de l’économie du logement, les moyens d’agir. » C’est le moins qu’on puisse demander. Rappelons que le « droit au logement » est inscrit dans la loi et que tout gouvernement, sauf à faire voter une loi contraire, est responsable de la mise en pratique de ce droit fondamental.
Qui finance le logement social ?
Les locataires ne peuvent qu’applaudir la prise de position de la représentante des bailleurs sociaux. Un rappel complémentaire est toutefois nécessaire. Les bailleurs HLM ont pour quasi unique ressource les loyers des locataires. Pour l’année 2024, selon les chiffres de l’USH, vingt-trois milliards ont ainsi été quittancés. Cette contribution, invisibilisé dans les discours officiels, se traduit par UNE phrase sur un paragraphe dans l’analyse prospective que dresse la Banque des territoires dans sa brochure sur : « Perspectives – L’étude sur le logement social / édition 2025 ».

On peut lire en effet « Pour rappel, les loyers et redevances constituent la principale ressource des bailleurs sociaux. » C’est une évidence, mais elle ne fait l’objet nulle part d’analyse et de reconnaissance du rôle décisif que jouent les locataires en matière économique. En effet, depuis le désengagement total de l’État, non seulement les HLM ne sont plus subventionnés mais le secteur est contributeur net au budget de l’État.
Ce que souligne la contribution d’Emmanuelle Cosse au débat public, est que les 16 milliards d’euros détournés par l’État, dont elle dénonce à juste titre la maltraitance, sont en dernière instance des taxes prélevées sur les loyers des locataires du logement social. C’est le monde à l’envers.
Agir maintenant avec les locataires
À ce jour, ni les associations de locataires, ni les bailleurs dans leur majorité, ni les syndicats, ni les partis politiques progressistes n’ont pris la mesure de l’énormité du détournement. L’augmentation des loyers ces dernières années a été « plafonnée » à 3,5 %. En cumul sur les années 2022 à 2025 cela représente une augmentation supérieure à la hausse des prix qu’ont subi par ailleurs les locataires par l’inflation notamment sur les produits et services du quotidien.
Autre exemple, l’étude de la Banque des territoires mentionne, au titre des charges que supportent les bailleurs sociaux, le prélèvement de l’État au titre de la TFPB : « Enfin, la contribution annuelle du secteur au titre de la Taxe foncière sur les propriétés bâties (TFPB) s’élève à 3,1 milliards en 2023, représentant 11,6 % des loyers (+0,6 points) et 1/5éme des dépenses d’exploitation des bailleurs. Il s’agit du poste de dépenses ayant le plus progressé en 2023 (+10,1%). » Ce n’est pas Nicolas-qui-paie mais les locataires HLM.
On est loin des caricatures sur l’assistanat qui ont cours dans la majorité des médias. Et loin des propos que l’on entend sur les bancs des parlementaires de droite et macronistes concernant la reconnaissance que les locataires HLM devraient avoir pour l’État bienfaiteur. Et navrant de constater que nombre de ces propos traduisent une méconnaissance crasse de la réalité du logement social et des mécanismes économiques de ce secteur.
Emmanuelle Cosse a raison : « Il faut agir maintenant ». Pour le logement social, pour la trésorerie des bailleurs mais surtout avec les locataires et les demandeurs de logement locatifs sociaux.
Robert Crémieux
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