J’écris ton nom : apartheid

Depuis le 7 octobre 2023, le terme d’apartheid utilisé pour décrire le régime politique israélien suscite l’indignation en France des bien-pensants du soutien inconditionnel à Israël. Pour ma part je ne vois dans ce mot que la description raisonnable et argumentée d’une réalité, politique officielle du gouvernement israélien.

Les Editions de Minuit – 1985

Selon le dictionnaire Le Robert, le mot apartheid désigne « un régime de ségrégation systématique qui existait, en Afrique du Sud, entre Blancs et Noirs », jusqu’en 1991. Il s’agissait alors d’une politique dite de « développement séparé » des populations, selon des critères purement raciaux. Plus généralement le mot d’origine afrikaner est aujourd’hui couramment employé pour décrire la ségrégation raciale, institutionnelle ou de fait, qui existe dans de nombreux pays.

Pour les défenseurs inconditionnels de la politique d’Israël, il s’agit d’une insulte et pour certains « progressistes » parmi les défenseurs d’Israël une accusation injuste. De fait, les droits civiques des Arabes israéliens sont d’après la loi les mêmes que ceux des Juifs. Toutefois, depuis 2018 la loi fondamentale (le pays n’a pas de Constitution) a été modifiée pour instaurer la notion d’Israël « État-nation du peuple juif ». Ce qui introduit une différence entre les populations, condamnant de fait les Arabes et les Chrétiens israéliens à une sous-citoyenneté.*

Ce premier accroc doit être complété par la réalité politique de la région. Le gouvernement exerce une tutelle et donc la responsabilité sur des territoires qui sont sous la domination directe et complète, sous des modalités différentes, du gouvernement israélien : Jérusalem-Est, Gaza et la Cisjordanie. La diplomatie et l’armée israéliennes contrôlent ces trois entités au niveau des frontières et de la vie économique et sociale. La Palestine, nom dont se revendiquent à juste titre les habitants de ce territoire (où originaires de ce territoire pour celles et ceux qui vivent dans des camps dans les pays voisins) n’existe pas pour le gouvernement israélien. D’où son refus, sous des prétextes aussi fantaisistes que variés, de la solution à deux Etats qui est actuellement soutenue notamment par la majorité des pays de l’ONU.

Il est particulièrement affligeant de voir dans les médias français, la majorité des journalistes qui sont appelés à intervenir sur le sujet de la guerre Israël-Palestine ignorer la portée réelle de ce qui est un fait et non de la propagande : le gouvernement israélien mène une politique d’apartheid. Notamment. Il n’y a là ni propagande islamo-gauchiste, ni apologie du terrorisme pour reprendre le langage à la mode des ministres-policiers macronistes.

Petit rappel. Celui qui en parle le mieux, de l’apartheid, à part Rima Hassan, c’est évidemment Nelson Mandela. Dans le livre, paru en France en 1985, il définit par la même occasion en 1963-64 à l’occasion de son procès, ce qui est l’alternative. Citons-le en conclusion, valable évidemment pour l’Afrique du Sud comme pour tout pays qui subit ce fléau raciste :

« Avant tout, nous voulons des droits politiques égaux, parce que sans eux nous restons impuissants. Je sais que cela sonne de façon révolutionnaire pour les Blancs de ce pays, parce que la majorité des électeurs sera constituée d’Africains. Oui, le Blanc a peur de la démocratie. Mais on ne peut permettre à cette crainte de barrer le chemin à la seule solution qui garantira la paix et la liberté pour tous. »

Dernière remarque pour la route. Le procès dit de «Rivonia » s’acheva à l’époque par la condamnation de Mandela et de sept coaccusés Africains noirs, un Sud-Africain indien et un Sud-Africain blanc. Il s’appelait Dennis Goldberg.

Robert Crémieux

*Pour approfondir le sujet, on peut se reporter à la revue Orient XXI qui traite sur le fond notamment les questions israéliennes et palestiniennes.

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