Eté pourri, rentrée politique hors-sol

Capitaine de pédalo à moteur

Bizzarre, bizzarre. Je ne sais pas si vous ressentez comme moi l’anormalité de cette pré-rentrée. Il règne une instabilité dans l’air, comme si le futur proche était suspendu. Comme si, malgré l’agitation du gouvernement, plus personne ne faisait de projets.

Pour ma part peut-être est-ce dû à la prolongation de mes vacances dans la Drôme jusqu’au dernier moment. Ma perception est-elle faussée par l’éloignement de la région Ile-de-France ? J ‘ai tendance à appréhender le retour à reculons. Pas l’envie.

Peut-être le recul sur l’actualité me fait prendre ma propre vacance comme un ressenti que ne partagent pas celles et ceux qui reprennent le boulot, les familles qui préparent la rentrée scolaire, les chômeuses et chômeurs qui se demandent encore s’il leur suffira de traverser la rue.

Au final, rassurez-moi. Dites-moi que mon impression que quelque chose ne tourne pas rond dans le monde n’est partagée par personne. Et si ce n’était qu’un problème franco-français ? Mais non, regardez. Le Liban est en train de couler et notre président de la République prétend lui dicter sa feuille de route politique. Alors même qu’il n’est pas sûr de faire face au défi de notre pays pour la rentrée, Macron dixit.

Au Mali la situation est révolutionnaire, au sens où le peuple est en insurrection. Que font les pays africains et l’Union européenne, France en tête ? Des magouilles pour restaurer l’ordre néo-colonial et imposer des solutions à coups de fermetures des frontières et de pressions militaires. La principale force militaire dans le pays n’est pas l’armée malienne, sous-équipée, mais l’armée française et dans une certaine mesure celle de la Minusma, plus ou moins aux ordres. Où cela va-t-il nous entraîner alors que des années de solution militaire n’ont rien réglé au chaos du pays ?

Les images quotidiennes en provenance des Etats-Unis me sidèrent. Le pays est en révolte, la police raciste tue presque chaque jour, quand ce ne sont pas les milices terroristes d’extrême-droite. Cela n’empêche pas Trump de vouloir dire le droit international et d’empêcher les peuples d’Amérique latine (notamment mais pas que) de choisir leur voie. La France y perd chaque jour un peu plus de sa souveraineté, avec le consentement empressé de Macron et de sa majorité LREM. Les traités de libre-échange comme le CETA et le droit commercial US prennent le pas sur la Constitution française (qu’il serait temps de faire évoluer vers la 6e République, mais bon).

Les médias français en font des tonnes sur la future élection présidentielle aux Etats-Unis. Chaque convention des Démocrates et des Républicains donnent lieu à des émissions fleuves, chaque prise de parole d’un proche de Trump ou de Biden fait l’objet de commentaires, mais la situation dans notre propre pays n’a droit qu’à des péroraisons d’experts médiatiques clownesques. Le tsunami social qui vient, les défis climatiques à relever, les actions et propositions syndicales, les prochaines élections régionales et départementales voire la présidentielle n’ont droit qu’à des approximations minutées.

Masque ou pas masque, that is the question

J’ouvre la télé sur n’importe quelle chaîne télé et j’apprends jour après jour que la seule question à se poser est : « masque ou pas masque ». Il est clair que la pandémie de coronavirus n’est pas une petite affaire à prendre à la légère. Mais il est tout aussi clair que la gestion politique et médiatique de la crise sanitaire n’a fait qu’apporter de la confusion. Incompétence ou volonté, à ce stade je ne sais plus. Autour de moi la majorité oscille entre fatalisme, incompréhension et angoisse. Nous sommes dépossédés de notre propre existence par un pilonnage médiatique anxiogène derrière lequel les transnationales pharmaceutiques jouent leur partition mortifère et tirent les ficelles.

Nos élus.es clichois sans légitimité populaire du fait de l’abstention font comme si tout allait bien et étalent leur contentement d’eux-mêmes. « Regardez mon bilan, il est beau mon bilan ! ». « J’ai distribué des masques ! ». « J’ai créé des numéros d’appel téléphoniques ! ». « J’ai commémoré le sacrifice des pilotes de la RAF ! ». « J’ai mis des caméras de surveillance partout ! ». « Je fais construire des immeubles à tour de bras ! »

Euh… Les Clichoises et les Clichois survivront-ils à ce raz-de-marée immobilier de logements auxquels ils ne pourront accéder ? A la prochaine canicule ? A la déferlante du chômage et à la pollution atmosphérique ? A l’horizon technocratique incertain du Grand Paris, des grands projets inutiles et des Jeux olympiques de 2024 ? A la déconstruction méthodique des services publics ? Y a-t-il un pilote dans l’avion pour nous dire sérieusement où nous allons ?

Ah oui, le pilote il se nomme Macron (ne parlons pas de Castex qui n’est qu’un homme de paille). A part le Maire macroniste Muzeau et la députée fantôme Calvez, y a-t-il encore quelqu’un ou quelqu’une à Clichy pour croire à la réalité de sa parole et de son action pour faire face aux problèmes que nous affrontons ? L’image de cet été pourri que je retiens est celle mise en avant par Macron lui-même. Un estivant sur un jet-ski. Le précédent Président de la République était un capitaine de pédalo, on a désormais un capitaine de pédalo à moteur. Question modernisation des institutions, il y a mieux quand le monde affronte les pires défis depuis la seconde guerre mondiale. On imagine mal De Gaulle ou même Mitterrand communiquant sur son scooter des mers. Ce n’est pas sérieux.

Je ne sous-estime pas la capacité de résistance du peuple. Elle se heurte certes à la répression policière, à la propagande médiatique, à la Sainte alliance internationale des milliardaires mais elle n’a pas dit son dernier mot. Ni en France, ni au Mali, ni en Biélorussie, ni au Liban, ni en Bolivie. Ni à Paris et à Washington, ni à Clichy, Saint-Ouen ou Gennevilliers.

J’ai eu la chance au mois d’août de pouvoir passer deux jours aux AMFIS d’été de la France insoumise. J’y ai fait le plein d’idées pour remettre sur ses pieds un monde qui marche sur la tête. J’y ai pris confiance dans une nouvelle et jeune génération politique qui n’abdique pas. Qui propose, débat et agis. J’espère pouvoir encore mettre cette moisson du mois d’août au service des luttes. A la fin, c’est nous qu’on va gagner.

Robert Crémieux
Montbrun, jeudi 27 août 2020

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Mali : un peuple debout face aux sanctions de la CEDEAO

La chute du Président Ibrahim Boubacar Kéita (IBK) et de son régime n’a eu pour seule réponse des dirigeants de la Communauté Economique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO), que de dégainer une série de sanctions contre le pays, contre le peuple avec notamment, la fermeture des frontières, un blocus économique, commercial et financier.

Le communiqué de la CEDEAO daté du 19 Août 2020, les résolutions du sommet extraordinaire virtuel des chefs d’Etats de l’organisation Ouest-Africaine du 20 août 2020, relèvent plus d’un combat d’arrière garde mis en place par des chefs d’Etats aux abois prêts à tout, pour sauver leurs propres pouvoirs, honnis par les peuples.

Pour ce qui est de la Guinée et de la Côte d’Ivoire, les deux chefs d’Etats ont trahi leurs serments en briguant un troisième mandat après un tripatouillage des constitutions de leur pays. De véritables coups d’Etats déguisés.

Alassane Dramane Ouattara et Alpha Condé ont décidé de se maintenir au pouvoir, refusant l’alternance, sans provoquer l’indignation, la protestation, la condamnation du Club des Chefs d’Etats de la CEDEAO.

En préconisant des mesures discriminatoires, drastiques contre le Mali, en cherchant à étouffer notre peuple, les dirigeants de la CEDEAO, devraient avoir à l’esprit qu’ils ont à faire au pays du Président Modibo Keïta : le Mali, un grand pays, un grand peuple, fier, digne, combatif.

Nous sommes les héritiers de ce grand homme d’Etat qui a dû affronter les coups tordus de la France et de plusieurs pays voisins. Après notre souveraineté acquise, Modibo Kéïta et ses compagnons ont su (en huit ans) bâtir une nation, construire de nombreuses unités industrielles, réaliser de grandes infrastructures. Toutes choses qui faisaient à l’époque, la fierté de l’Afrique. Nous devons nous en inspirer.

La page IBK est tournée. Notre peuple, avec à sa tête un groupe d’officiers de l’armée malienne, a pris son destin en main mettant fin ainsi à sept ans de gouvernance corrompue.

Rien n’arrêtera la détermination de notre peuple à construire un Mali nouveau.Un Mali de paix, de justice sociale, de progrès économique. Un Mali démocratique, républicain et solidaire.

Les gesticulations des dirigeants de la CEDEAO n’intimideront pas notre peuple qui avec courage, détermination et dignité, saura résister aux ingérences d’où qu’elles viennent.

Si les provocations et autres mesures discriminatoires contre notre pays devaient perdurer, le retrait du Mali de la CEDEAO pourrait s’imposer. Notre pays frère voisin, la Mauritanie, n’en est pas membre. Il ne s’en porte pas si mal.

L’espoir est grand de voir notre pays retrouver sa grandeur, son aura d’antan.

L’heure est au rassemblement de toutes les forces vives de la Nation, patriotique et démocratique pour construire un Mali moderne et démocratique, pour répondre aux aspirations de notre peuple.

Nous disposons de ressources pour relever le défi.

Bassirou Diarra

Ancien Secrétaire Général Adjoint de la Présidence de la République du Mali

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Mali : l’espoir

Après la chute du régime d’Ibrahim Boubacar Keïta

Un article de Bassirou Diarra

Des officiers de l’armée malienne viennent de parachever, ce 19 Août 2020, la lutte du peuple malien en mettant fin à sept ans de pouvoir du régime d’Ibrahim Boubacar Keïta (IBK).

Sept ans au cours desquels tous les clignotants sont passés au rouge : déliquescence de l’enseignement, santé moribonde, baisse du pouvoir d’achat de la population, justice aux ordres, corruption généralisée, insécurité, répression…

IBK a signé à Kati : sa démission, celle de son gouvernement, et a prononcé la dissolution de l’Assemblée nationale. Il était temps car cette démission était réclamée depuis plusieurs mois par le peuple malien, voulant mettre un terme à un régime conduisant notre pays vers l’abîme.

Des mois de combats acharnés sous la conduite du Mouvement du 5 Juin (M5- RFP) et le soutien de l’autorité morale, l’Imam Mahmoud Dicko.

Le Comité National pour le Salut du Peuple (CNSP) mis en place par les officiers de l’armée malienne, vient de donner les premières indications sur sa feuille de route : dissolution de l’Assemblée nationale, mise en place d’une transition politique dirigée par des civils, respect de tous les accords internationaux du Mali (bilatéraux et multilatéraux), élections générales.

Depuis mardi et la chute du régime de Ibrahim Boubacar Keïta, nous assistons à un déchaînement de ladite « Communauté internationale » contre le renversement d’un pouvoir honni par le peuple.

Une « Communauté internationale » qui n’a rien fait contre la souffrance du peuple malien, rien fait après les tripatouillages électoraux de mars et avril 2020.

Une « Communauté internationale » qui a fermé les yeux sur les massacres (23 morts) des 10-11 et 12 Juillet 2020 et qui aujourd’hui menace de sanctions le peuple malien.

Les officiers maliens qui ont pris leur responsabilité – sans effusion de sang – pour mettre fin à la dérive et à la crise socio-politique sont l’émanation du peuple, victimes eux aussi, de la corruption qui a gangrené toutes les sphères de l’Etat.

L’Histoire nous rappelle que des militaires révolutionnaires ont fait preuve de patriotisme, d’engagement contre le colonialisme, le néo-colonialisme, l’impérialisme et les dictatures. Je pense aux capitaines de la Révolution des œillets au Portugal, au capitaine Thomas Sankara du Burkina Faso, au colonel Hugo Chavez du Venezuela, au capitaine Jerry Rawlings du Ghana.

Face à la nouvelle situation que connait notre pays, c’est aux politiques d’assumer leurs responsabilités et d’éviter les erreurs de la révolution du 26 Mars 1991.

Il s’agit de conduire notre pays vers de vrais changements.

Répondre à l’espoir et à l’espérance du peuple malien : telle est la mission qui revient aujourd’hui aux partis politiques, aux démocrates, patriotes, progressistes et républicains de notre pays.

Bassirou Diarra

* Ancien Secrétaire Général Adjoint de la Présidence de la République du Mali

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Mali : tribune de Bassirou Diarra

Notre ami Bassirou Diarra nous a fait parvenir une tribune suite aux événements du Mali et la récente visite de chefs d’Etat africains pour une médiation. La situation évolue vite au Mali. Nous avons déjà évoqué les événements et la nécessaire solidarité pour le peuple du Mali. Vous trouverez également le lien pour un article sur Maliweb.net concernant le point de vue de l’opposition.

Tribune

Construisons la CEDEAO des Peuples

Après le séjour de Cinq Chefs d’Etats Ouest Africains à Bamako

Jeudi 23 Juillet 2020, le Mali a accueilli les chefs d’Etats de cinq pays de la sous-région Ouest Africaine : les présidents du Niger, du Sénégal, du Nigeria, du Ghana et de la Côte-d’Ivoire.

L’objectif de ce déplacement visait officiellement à participer aux efforts pour sortir le pays de la crise économique, sociale, politique, sécuritaire et de gouvernance.

Ce haut niveau d’intérêt accordé à notre pays, par les chefs d’Etats des pays voisins ne nous laissait pas indifférents car il aurait pu déboucher sur des ouvertures positives. Or, force est de constater que tel n’est pas le cas : le déplacement des  délégations de la CEDEAO (la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest) vers la capitale malienne s’est transformé en une opération de sauvetage d’un pair, le président Ibrahim Boubacar Kéïta.

En l’espace d’un mois, c’est la troisième délégation de médiation que l’organisation sous régionale dépêche au Mali. Pour un même résultat : réduire les souffrances du peuple malien à une simple crise post-électorale. Une injure à la dignité des Maliens.

Le cri venant du cœur du peuple malien n’a pas été entendu.

Avec les médiateurs de la CEDEAO, étrangers aux maux qui minent notre pays, l’insécurité grandissante, la corruption endémique, la gabegie, le népotisme ont de beaux jours devant eux.

La venue à Bamako des cinq Chefs d’Etats participe d’une stratégie claire : sauver Ibrahim Boubacar Kéïta et par ricochet se sauver eux-mêmes, la colère des peuples ne connaissant pas de frontières.

Plusieurs informations circulant sur les réseaux sociaux indiquent que les Chefs d’Etats de la CEDEAO menaceraient de sanctions, de « décisions fortes » les dirigeants du Mouvement du 5 Juin. Une intervention au Mali des forces spéciales de la CEDEAO ne peut être exclue.

Pourtant, 2012 n’est pas si loin.

En effet, plutôt que d’agir en 2012, pour déloger les militaires putschistes (Amadou Aya Sanogo et ses complices) et réinstaller dans son fauteuil, le Président Amadou Toumani Touré, les dirigeants de la CEDEAO se sont contentés à l’époque, de demander au Président ATT, (démocratiquement élu en 2007), de démissionner. Une démarche contraire au Protocole de la CEDEAO.

En vrai patriote, se souvenant des mots prononcés le 19 Novembre 1968, par le Président Modibo Kéïta « Je ne souhaite pas qu’une goute de sang d’un Malien soit versée pour que je reste au pouvoir », le Président Amadou Toumani Touré avait remis sa démission aux prétendus « médiateurs » de la CEDEAO, pour épargner la vie de Maliens.

Peuple des grands empires, les Maliens jaloux de leur souveraineté, résisteront avec courage et détermination.

Dans sa quête farouche d’un profond changement au Mali et son combat pour mettre fin au régime de Ibrahim Boubacar Kéïta, le peuple malien a plus que jamais besoin du soutien et de la solidarité des peuples frères, du Sénégal, du Niger, du Nigeria, du Ghana et de la Côte-d’Ivoire.

Construisons la CEDEAO des Peuples et mettons fin au Club de Chefs d’Etats solidaires dans leur action, visant uniquement à préserver leur maintien au pouvoir.

Honneur aux 23 martyrs des 10, 11 et 12 Juillet 2020.

Bassirou Diarra

Ancien secrétaire général Adjoint de la Présidence de la République
Commandeur de l’Ordre National du Mali
Chevalier de la Légion d’honneur (France)

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Mali : un appel à la solidarité des peuples

Notre ami Bassirou Diarra nous a fait parvenir un texte sur la situation au Mali. Il souligne l’ampleur de la révolution citoyenne et de la violence de la répression. Le Mouvement du 5 Juin auquel il participe est porteur des revendications populaires.
Bassirou Diarra a été réfugié politique en France puis a rejoint le Mali à la chute de la dictature. Il a longtemps représenté les travailleuses et travailleurs maliens en France auprès des autorités de Bamako comme de Paris. Candidat aux élections législatives, en ballotage à la sortie des urnes à l’issue du premier tour, il a vu le candidat du pouvoir proclamé vainqueur par la Cour constitutionnelle aujourd’hui dissoute.

Ibrahim Boubacar Keïta doit démissionner

Le président de la République du Mali, Ibrahim Boubacar Keïta (IBK), a déclenché vendredi 10 et samedi 11 juillet 2020, une violente répression contre les manifestants qui l’appelaient à quitter le pouvoir. Bilan : une dizaine de morts, plus d’une centaine de blessés, de nombreuses arrestations.

Elu en 2013, pour un premier mandat avec 77,78% des voix, Ibrahim Boubacar Keïta, a été plébiscité sur la base d’une promesse électorale : « Pour l’Honneur du Mali, Pour le Bonheur des Maliens, le Mali d’Abord »

Un slogan de campagne qui a trompé les populations d’un pays, sortant d’un coup d’Etat militaire (mars 2012), aux terribles conséquences et d’une rébellion touareg dans le Septentrion malien.

Réélu en 2018, avec 67,16% des voix, pour un second et dernier mandat, l’honneur du Mali est devenu un cauchemar, le bonheur des Maliens une chimère. Le « Mali d’abord »  s’est transformé en « ma famille d’abord ».

Le Mali est plongé dans une profonde et dangereuse crise socio-politico-sécuritaire et dans un marasme économique sans précédent.  

Au nord du pays, la région de Kidal est hors contrôle de l’Etat ; la région de Mopti (centre) s’est embrasée avec des attaques djihadistes et des affrontements intercommunautaires faisant des centaines de victimes et de très importants dégâts matériels.

De 2012 à 2020, l’armée malienne a payé un lourd tribu. Des centaines de nos vaillants soldats ont péri dans les combats contre les terroristes. Quant à l’école malienne, elle a été sacrifiée et depuis trois ans les enseignants s’affrontent au gouvernement.

La corruption généralisée a gangrené toutes les sphères de l’Etat. Gabegie, népotisme, clientélisme sont devenus les règles.

Face à cette pitoyable gouvernance, aux défaillances des services de l’Etat, à la dégradation de la situation sécuritaire, au ras-le-bol général, le peuple est descendu dans la rue.

D’abord (à l’image du Hirak d’Algérie), le vendredi 5 juin avec des dizaines de milliers de manifestants, place de l’Indépendance à Bamako ; puis, le vendredi 19 juin, avec un plus grand nombre de manifestants. Enfin, le vendredi 10 juillet, un nouveau rassemblement suivi du massacre de nombreux manifestants.

Des membres de la force anti-terroriste (FORCAT) ont participé à la répression aveugle, barbare qui s’est abattue sur les manifestants, y compris dans la mosquée de l’Imam Mahmoud Dicko. Les jeunes maliens sont aux avants postes de la mobilisation populaire contre l’oligarchie au pouvoir.

Il y a les morts et les blessés. Il y a aussi dix des principaux responsables du Mouvement du 5 Juin, placés en détention.

Un tel déchainement de violences contre les populations aux mains nues, c’est du jamais vu au Mali. Et plusieurs sources indiquent que des mercenaires étrangers prêteraient aide et conseils aux forces de police.

Le Mouvement du 5 Juin

Le Mouvement du 5 Juin, une coalition regroupant des partis politiques, des associations de la société civile et des mouvements religieux est à la pointe du combat.

Les demandes du M5 – RFP (Rassemblement des Forces Patriotiques) sont formulées dans un mémorandum remis en main propre, au chef de l’Etat par l’iman Mahmoud Dicko.

Première revendication : la démission du président de la République et de son régime.

La mascarade électorale avec bourrage d’urnes et achats de vote, le tripatouillage par la Cour Constitutionnelle des résultats des élections législatives des 29 mars et 19 avril derniers, ont été entre autres, les détonateurs de ce mouvement populaire.

Resté sourd aux doléances des manifestants, le président de la République a joué la montre, tablant sur une usure du M5 – RFP et sur un pourrissement du mouvement. La colère n’a pas faibli. Au contraire, l’insurrection a gagné l’ensemble du pays, de Kayes à Tombouctou, en passant par Koulikoro, Ségou, Sikasso et Mopti.

La venue d’une délégation de ministres de pays membres de la CEDEAO, ainsi que l’intervention de chefs d’Etats de la sous-région n’y ont rien fait. Le peuple reste débout, déterminé à user de sa souveraineté, pour mettre fin au régime corrompu et dictatorial. Avec pour seul mot d’ordre : la désobéissance civile sur toute l’étendue du territoire.

Dans son combat pour le changement, le peuple malien a plus que jamais besoin du soutien et de la solidarité des forces progressistes et démocratiques du monde entier.

Après les événements tragiques de ces derniers jours et les atrocités du régime, rien ne sera plus comme avant au Mali.

Bassirou Diarra
Commandeur de l’Ordre national du Mali
Chevalier de la Légion d’Honneur (France)

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