Dès sa prise de fonction comme Premier ministre, Gabriel Attal a annoncé que l’une de ses priorités était une nouvelle réforme de l’assurance-chômage « pour inciter au retour à l’emploi ». Le gouvernement souhaite de nouvelles règles d’indemnisation dès juillet 2024.

Sa feuille de route, Attal, il la tient du Président de la République, ce n’est pas un secret. Et sur cette question il se moule dans une des marottes de Macron. Encore candidat à la présidentielle le 5 mai 2017 celui-ci résumait ainsi dans un entretien à Mediapart sa proposition : « Sur le chômage, qu’est-ce que je propose ? Ce n’est pas de sortir d’un modèle solidaire, c’est de sortir d’un modèle assurantiel. » En clair, l’État doit enlever la gestion du chômage à l’UNEDIC, c’est-à-dire aux syndicats et patronat. « Je rentre dans une logique universelle, où l’État reprend la main avec les partenaires sociaux autour de la table. » Autour de la table, mais en spectateurs.
L’économiste Michel Husson avait à l’époque vu juste quand il écrivait le 10 mai 2017, relevant ce passage d’une logique d’assurance salariale à celle d’une assistance octroyée par l’État : « La porte est alors ouverte à une indemnisation du chômage déconnectée des cotisations et indexée sur les seules contraintes budgétaires. (Alternatives économiques)
« Un nouveau tour de vis »
Pile, nous y sommes. Le gouvernement agite le spectre du déficit public à 5,5 % en 2023 pour relancer ce que le journal Les Echos appelle un « un nouveau tour de vis sur l’assurance-chômage ». En fait le mauvais tour en question s’appliquerait surtout aux chômeurs, chômeuses et précaires, l’assurance chômage proprement dite ayant vécu à partir du moment où l’indemnisation n’est plus la contre-partie d’une cotisation.
Depuis le premier quinquennat de Macron les réformes se sont succédé, toujours dans le sens d’un durcissement des conditions d’indemnisation. En 2021, le mode de calcul de l’allocation a augmenté le nombre de mois nécessaires pour être couvert et instauré une dégressivité pour les hauts salaires. En 2023 la « modulation » de la durée d’indemnisation en fonction de la conjoncture a été introduite.
Une échéance électorale est toujours, à droite, un prétexte pour des effets de manche stigmatisant les chômeurs. Sarkozy avait lancé la mode. Attal annonce vouloir jouer sur l’un des paramètres de l’indemnisation pour faire des économies sur le dos des sans-emploi en pleine campagne des européennes. Pas sûr que le public tombe dans le panneau.
Sur le plan économique, la mesure n’est prise au sérieux par personne. L’économiste Eric Heyer (OFCE) estime qu’il peut y avoir quelques euros à gratter mais surtout, conclut-il, cela permettrait de « rassurer les partenaires européens et les marchés financiers »… « Surtout, c’est assez populaire de taper sur les chômeurs » (Les Échos avec AFP).
Et puisqu’il s’agit de stratégie minable pour la période de l’élection européenne, il est clair que l’enjeu est non seulement franco-français mais aussi européen puisque les plans préparés à Bruxelles tablent sur une relance vigoureuse des politiques d’austérité. En cas de victoire de la droite, alliée des macronistes avec la complicité de l’extrême-droite, salariés.es, sans-emploi, retraités.es seraient amenés.es à payer la note. Il n’est pas vrai que les décisions de Bruxelles soient déconnectées de celles prises à Paris.

En revanche, un succès de la principale force d’opposition, en France, aux politiques réactionnaires menées à Paris comme à Bruxelles, serait un caillou dans leur chaussure. Faisons en sorte qu’il soit le plus gros possible avec le bulletin le 9 juin de la liste d’union populaire conduite avec maîtrise par Manon Aubry.
Robert Crémieux
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